Depuis l’avènement de Grand Theft Auto III, qui proposait un monde ouvert où la liberté d’action donnait le vertige, les joueurs n’ont cesse depuis de rechercher ce frisson de liberté. L’éventail des possibilités d’action proposé par un jeu garantirait-il une plus grande satisfaction chez ses utilisateurs ? Sans aucun doute, et Larian Studio, depuis la création des Divinity Original Sin l’a très largement compris, tant et si bien que ses deux CRPG précédents (Original Sin I et II) ont été maintes fois reconnus comme offrant “les meilleures sensations de jeu de rôle sur table manette en main”. Car quel support ludique peut se targuer de proposer plus de liberté qu’un jeu de rôle papier ?
Baldur’s Gate 3, qui transcende les deux RPG précédents du studio indépendant belge, est cette fois-ci adapté d’un jeu de rôle papier existant bel et bien, et reprend son univers et ses règles : Dungeons & Dragons dans sa cinquième et ultime édition. Comment parvient-il à retranscrire les sensations du jeu de rôle sur table ? Dans quelles limites ?
Certes, Larian s’est permis de modifier quelques points de règle, dans un but d’amélioration et d’équilibrage, comme par exemple en permettant aux rangers de pouvoir s’améliorer aussi rapidement que les autres classes, en laissant les alliés se partager l’initiative en combat ou encore en considérant l’usage des potions comme de simples actions bonus et non comme des actions simples. Néanmoins, l’essence même des règles de Dungeons & Dragons 5 est respectée, et ce jusqu’au moindre jet de dé représenté à l’écran. Le joueur de DD5 sur table ne sera donc absolument pas dépaysé, d’autant que c’est la version officielle des Royaumes Oubliés qui est modélisée.
On pourra également noter la théâtralité de la plupart des séquences jouées par les acteurs, l’intensité des combats, les dialogues offrant un éventail de choix vertigineux, l’arbre de conséquences qui n’en offre pas moins, la qualité graphique et sonore comme autant d’éléments faisant de Baldur’s Gate 3 une expérience ludique immersive de l’acabit d’une partie de jeu de rôle papier. L’arbre de conséquences aura d’ailleurs même fait pâlir d’envie certains développeurs de Bethesda sur Starfield (qui ne propose qu’une seule fin).
Malgré tous ces éléments et possibilités, le rôliste convaincu pestera contre une liberté certes vertigineuse, mais pas infinie, de par l’absence de maître de jeu humain s’offrant le loisir d’improviser telle ou telle situation. Il n’en reste pas moins que le jeu de Larian est un excellent tremplin vers la version papier de D&D5 ou vers d’autres jeux de rôle sur table.
Jeu vidéo brillant, aux possibilités extrêmement variées et nombreuses, Baldur’s Gate 3 mérite son titre de jeu de l’année 2023, année pourtant riche en jeux de qualité et bons RPG. L’expérience de jeu est telle qu’elle se permet d’approcher parfois les sommets d’une campagne de jeu de rôle sur table, dans les limites imposées par le support numérique et l’absence de maître de jeu.

